Ce 3 février 2021, un nouvel arrêté a été publié concernant l’utilisation de chiens dans le secteur du gardiennage.
Malgré la volonté de rassembler un maximum de règles dans la récente loi du 2 octobre 2017 relative à la sécurité privée et particulière (communément appelée « Loi Jambon »), un certain nombre de dispositions avaient été maintenues dans des arrêtés d’exécution distincts.
Il en était ainsi de l’utilisation de chiens, qui était jusqu’ici insérée dans 5 articles de l’arrêté royal du 15 mars 2010 réglant certaines méthodes de gardiennage.
Ceux-ci font place à de nouvelles règles, contenues dans l’ « arrêté royal du 05.01.2021 relatif à l’utilisation de chiens lors de l’exercice d’activités de gardiennage telles que visées dans la loi du 2 octobre 2017 réglementant la sécurité privée et particulière ».
Ce nouvel arrêté royal n’est pas réellement novateur, dès lors que les principes généraux existants sont confirmés, mais il précise et rajoute de nombreux détails et règles absents de la précédente législation, particulièrement succincte.
Nous en parcourons les principales règles applicables aux entreprises de gardiennage.
Il ne sera désormais plus permis de « partager » un chien entre plusieurs maîtres-chiens.
S’il est toujours interdit d’utiliser un chien comme arme ou de le déployer pour attaquer, les nouvelles règles vont encore plus loin en interdisant l’utilisation de chiens :
- comme moyen de contrainte
- entraînés à attaquer ou à mordre
L’arrêté royal prévoit d’ailleurs que si un chien attaque ou mord sur ordre de son maître, le chien ne pourra plus être utilisé dans le gardiennage et le maître ne pourra plus jamais être maître-chien !
Une nouvelle nomenclature est mise en place : dorénavant, un chien est soit « chien de patrouille » soit « chien pisteur » et ne pourra pas être utilisé pour les deux.
Première partie : les chiens de patrouille
Les chiens de patrouille remplacent l’ancienne formulation prévoyant l’utilisation de chiens comme « moyen préventif de dissuasion ».
Il n’étonnera personne que l’obligation pour le chien d’être muselé et gardé en laisse de maximum deux mètres, est maintenue.
Les nouvelles règles applicables imposent qu’il s’agisse toujours de chiens de berger, âgés d'au minimum 12 mois et qui peuvent exclusivement être déployés lors des cinq activités de gardiennage suivantes :
1) gardiennage statique
2) gardiennage mobile
3) surveillance et contrôle de personnes dits « résiduels » (c-à-d à l’exclusion des festivals, milieu de sorties et magasins)
4) gardiennage d'événements
5) gardiennage en milieu de sorties
L’utilisation de chiens de patrouille pour les trois premières activités susvisées est soumise à la condition qu’elles ne peuvent être exercées ni dans des (parties de) bâtiments accessibles au public ni dans des véhicules de passagers accessibles au public.
Il existe toutefois des exceptions : un chien de patrouille peut être utilisé dans un bâtiment ou une partie de bâtiment accessible au public dans les cas suivants :
1° les lieux visés par la loi du 2 octobre 2017 comme étant particulièrement vulnérables (les aéroports, les gares internationales, les sites nucléaires, les domaines militaires, les institutions internationales ou ambassades déterminées par le Roi, les facilités portuaires ISPS et les établissements SEVESO).
2° s'il s'agit d'un parking ou d'une galerie commerçante, entre 19 heures et 7 heures.
Pour les activités de gardiennage d'événements, et en milieu de sorties, l’utilisation de chiens de patrouille est limitée aux parkings ou sites non accessibles au public.
Pour l’ensemble des activités avec chien, il sera dorénavant interdit de les effectuer simultanément à un :
1° contrôle d'accès
2° contrôle de sortie
3° gardiennage armé
4° contrôle d'identité
5° contrôle des titres de transports dans le cadre des compétences des services de sécurité.
Enfin, l'utilisation ou la présence d'un chien de patrouille n'est pas autorisée en cas de réalisation d'un contrôle de sécurité après rétention suite à un flagrant délit ou, pour les agents de sécurité, en cas d'écartement de la zone de contrôle des titres de transport.
Deuxième partie : les chiens pisteurs
Les chiens pisteurs doivent être âgés d'au minimum 16 mois et être la propriété de l'entreprise, ou du service interne /de sécurité : ce qui veut dire que contrairement aux chiens de patrouille, il ne pourra pas appartenir au maître-chien, et ce à partir du 13 février 2022.
Ils peuvent être utilisés dans les activités de fouille de biens (« sweeping »), de détection des personnes non autorisées et comme moyen technique (12e activité de la loi).
Les chiens pisteurs ne peuvent être spécialisés et utilisés que dans un seul des domaines suivants :
- drogues
- personnes
- explosifs et composants d’explosifs
- munitions et armes
- accélérateurs d’incendie
- fuites de gaz
L’arrêté prévoit une utilisation pendant un maximum de 8 heures par 24 heures, y compris les périodes de repos : après chaque 30 minutes d'activité, le maître-chien doit laisser le chien se reposer pendant au moins 30 minutes.
1) Sweeping (l'article 3, 9° de la loi)
Lors d’une telle fouille, les chiens pisteurs doivent toujours être tenus en laisse d'une longueur maximale de deux mètres. La muselière peut être ôtée, mais uniquement pendant le pistage lui-même.
1.1) Fouille de biens mobiliers
Les biens mobiliers ne peuvent être fouillés à l'aide de chiens pisteurs que si cette fouille a lieu dans un lieu qui est rendu temporairement non accessible au public afin que la fouille puisse être effectuée sans entrave.
De plus, les biens qu'une personne a sur elle ou avec elle ne peuvent être fouillés que si les conditions suivantes sont remplies de manière cumulative :
1° l'intéressé les soumet volontairement à la fouille ;
2° les biens sont séparés de l'intéressé pendant la fouille ;
3° la fouille a lieu sous la vidéosurveillance ou dans la vue directe de l'intéressé ;
4° la fouille a lieu dans le cadre d`un contrôle d'accès ou s'il y a indication que la personne transporte ou a sur elle des objets ou substances visés à l'article 3, 9°, de la loi (à savoir : appareils d'espionnage, d'armes, de stupéfiants, de substances explosives, de substances qui peuvent être utilisées pour la confection de substances explosives ou d'autres objets dangereux).
Les conditions 1°, 3° et 4° ne sont toutefois pas applicables aux lieux visés à l'article 137 de la Loi Jambon, à savoir les aéroports, les gares internationales, les sites nucléaires, les domaines militaires, dans les institutions internationales ou ambassades déterminées par le Roi, dans les facilités portuaires ISPS et dans les établissements SEVESO.
1.2) Fouille de biens immobiliers
Les agents de gardiennage et de sécurité ne peuvent fouiller des biens immobiliers à l'aide de chiens pisteurs que dans des lieux ou parties de lieux où il n'y a au moment du début et pendant l'exécution de la fouille, pas d'autres personnes présentes que le gestionnaire du site ou les personnes qui y travaillent.
2) Les chiens pisteurs comme moyens de détection des personnes non autorisées (art. 144 de la loi)
Des chiens pisteurs peuvent également être utilisés pour détecter des personnes non autorisées dans les sites nucléaires ou dans les facilités portuaires ISPS.
A cette occasion les chiens pisteurs doivent toujours être tenus en laisse d'une longueur maximale de deux mètres.
Lors de la découverte d'une personne non autorisée, le chien pisteur doit immédiatement être muselé et tenu à l'écart de manière à ne plus participer à la suite du contrôle ou de la fouille.
Si l'agent de gardiennage effectue le contrôle en faisant grimper le chien pisteur dans un véhicule ou dans un espace de chargement, l'agent de gardiennage doit, lui, rester à l'extérieur du véhicule.
3) Chien comme moyen technique, tel que visé à l'article 3, 12° de la loi
Cette utilisation ne présente qu’un intérêt limité pour les entreprises privées dès lors que l’utilisation comme moyen technique ne peut être effectuée que sur ordre d'un service public habilité à effectuer des missions de pistage.
Troisième partie : incidents
Si, malgré l’attention particulière qui lui est portée, un chien utilisé dans le gardiennage devait mordre ou attaquer, il revient à l’entreprise de gardiennage d’informer immédiatement les services de police ainsi que la Direction Sécurité Privée du SPF Intérieur.
Les sanctions sont différentes en fonction de l’utilisation : exclusion de l’activité pour les chiens de patrouille, nouvelle attestation d’obéissance-sociabilité pour les chiens pisteurs.
En cas d’incident, ou pour toute question relative au gardiennage et à la sécurité privée, nos spécialistes sont à votre disposition par e-mail, par téléphone au 02/538.32.50 ou en prenant directement rendez-vous.
Sidney Lefèvre
Avocat Sub Rosa Legal