Lorsque l’exécution d’un contrat et son paiement ne sont pas supposés se réaliser en même temps, l’entreprise dont le rythme des affaires est soumis à cette contrainte, est confrontée régulièrement à deux problèmes. Celui de ne pas être payé, tout simplement, et celui de se retrouver en face d’une faillite et des autres créanciers dans la même situation que lui. Comment obtenir la garantie d’être payé dans ce contexte ? Le législateur a tenté d’y remédier en réformant la vieille institution du gage.
Jusqu’il y a peu, le contrat de gage impliquait qu’on apporte un objet chez un créancier-gagiste, qui vous donnait des liquidités en échange, et, si au bout d’une certaine période de temps l’argent n’était pas remboursé, celui-ci pouvait demander l’autorisation de vendre le bien et se payer dessus. Ceci impliquait trois inconvénients majeurs :
- Une situation stérile : ni le propriétaire de la chose mise en gage ni le créancier gagiste ne pouvaient utiliser le bien mis en gage.
- Impossibilité pour le constituant de constituer un second gage une fois que la chose avait été remise au créancier gagiste.
- Nécessité de passer devant un juge avant la réalisation du gage.
Quelle nouvelle forme de gage a dès lors intégré le code civil afin de remédier à ces inconvénients ?
Il s’agit dugage « de registre », devant être compris comme un gage sans dépossession. Pourquoi un « registre » (en dehors des taxes et redevances produites) ? Parce que l’inscription de votre contrat de gage dans celui-ci vous donnera la carte « cet objet ne peut se rapporter qu’à ma créance, ses autres dettes ne me concernent pas, cet état de fait étant public », collector fort convoité lorsque survient la faillite ou l’insolvabilité du débiteur. Ce mécanisme et ce registre des gages sont entièrement nouveau en droit belge.
- Mentions obligatoires ? Conséquences du non-respect des formalités.
L’enregistrement prévoit dans l’article qui le concerne à proprement parler, un certain nombre de mentions devant figurer sur le document d’enregistrement. Si des erreurs ou des omissions devaient être insérées sur celui-ci, la loi fait peser sur le créancier gagiste le risque de devoir assumer tout dommage résultant de l’inscription de données erronées, outre que le gage perdra son caractère d’opposabilité sauf si ces inexactitudes « …n’induisent pas gravement en erreur une personne raisonnable effectuant une recherche… ».
- Sur quels biens peut porter votre contrat de gage ?
Absolument tous les biens licites dont on est, ou deviendra avec certitude, propriétaire, exception faite des créances (papier indiquant qu’untel vous doit autant), celles-ci étant expressément exclues de la possibilité d’enregistrement par le texte.
L’absence de dépossession permet d’utiliser le bien mis en gage et le mettre à contribution. En effet l’entrepreneur qui met en gage sa camionnette, mais peut rouler dedans pour travailler sur ses chantiers, participe à sa propre solvabilité tout en ayant constitué une garantie pour son créancier.
Le gage peut potentiellement porter sur tous les biens du cocontractant, y compris ceux qui ne seraient pas déjà dans le patrimoine de votre débiteur au moment de la conclusion du contrat de gage.
- Pourquoi et comment enregistrer mon contrat de gage
Enregistrer le gage est en réalité indispensable. En effet, sans ce dernier pas de priorité en cas de concurrence entre créanciers lors d’une faillite. Mais en plus : illégalité de la réalisation (vente) unilatérale en cas de défaut de paiement (entre non-consommateurs).
Par exemple, si deux créanciers ont constitué un gage sur la voiture neuve d’un même client, c’est celui qui aura enregistré son contrat de gage en premier lieu qui sera payé prioritairement.
Et si les deux n’ont pas fait enregistrer leur gage et l’un d’entre eux l’a fait saisir puis vendre par huissier, le curateur de la faillite, ou tout autre créancier intéressé dans les autres hypothèses, pourra venir faire prendre en ses mains le produit de la vente sans qu’il ne puisse opposer quoi que ce soit.
- Sur qui pèse l’obligation de l’enregistrement, et à quel frais ?
C’est le créancier gagiste qui doit procéder à l’enregistrement
Après confirmation des données introduites, celui-ci est invité à procéder au paiement d’une redevance dont le montant varie selon la valeur de l’opération concernée. Comptez de 20 à 500 € pour l’enregistrement d’un contrat de gage et 8 à 200 € pour la radiation du contrat de gage.
Vous recevez ensuite un numéro d'identification unique du gage qui vous permettra de l’identifier ensuite en vue de le faire modifier, renouveler, céder ou radier du registre.
Par ailleurs,le registre est consultable par tous, moyennant le paiement de frais de consultation qui s'élèvent à 5 € chacune.
- Que se passe-t-il si mon débiteur ne me paie pas ?
Si votre contrat a correctement été rédigé et préalablement dûment enregistré, vous pourrez procéder à la saisie et à la vente du bien directement par l’huissier. Ici il faut distinguer selon que le constituant est un consommateur ou non.
Si votre débiteur est un consommateur, vous devrez introduire une procédure judiciaire. En effet, un article spécialement réservé au consommateur dans le livre du Code civil consacré au gage, mentionne expressément que toute clause ou pacte autorisant le créancier à vendre directement le bien gagé sans passer devant un juge, est nul. En effet le législateur estime qu’il est nécessaire qu’un juge examine que toutes les conditions sont bien remplies avant d’autoriser la vente.
Cependant, rien n'empêche les parties, ensuite, de rédiger un complément écrit au contrat pour renoncer expressément à passer devant un juge pour réaliser le gage en cas de non-respect du contenu du contrat de base.
Enfin, si le débiteur n’est pas un consommateur, la vente sans l’étape « procès » sera la règle. Vous n’aurez pas besoin de passer devant un juge pour faire exécuter votre gage, mandater un huissier suffira pour obtenir le paiement de votre créance. Ceci étant dit, une lecture attentive des articles signale que le contrat devra clairement préciser cette possibilité sans indiquer pour autant comment se faire. Que resterait-il aux avocats n’est-ce pas ?
« Un avocat c’est quelqu’un qu’il faut voir avant, pour éviter les ennuis après. »